Thibault Hazelzet est né en 1975, diplomé de l'école des Beaux-Arts de Versaille.

1ère exposition personnelle à la galerie Henri Chartier avec les séries "La Guerre", "Babel" et "Danaé" en 2009

 

"De prime abord, les images de Thibault Hazelzet, déconcertent: agissant comme autant de surfaces réfléchissantes face auxquelles le regardeur s'égare, leurs effets de transparence et de reflets se conjuguent pour rendre la lecture délicate, entre la fenêtre ouverte sur le monde et le miroir intérieur.

Caches, griffures, superpositions, strates, contribuent à l'apparation de perspectives impossibles, à l'avènement d'images aux logiques spatiales discordantes. Les espaces enregistrés ne sont ni vraiment ici ni vraiment là, mais dans un entre-deux indéterminable où s'interpénètrent trois lieux tout aussi réels mais de nature différentes : celui de l'atelier de la prise de vue, celui des architectures éphémères réalisées par Thibault Hazelzet pour l'occasion, celui, enfin, de la chambre photographique elle-même. Trois espaces réunis et métamorphosés par l'opération photographique en quatrième, en deux dimensions celui-ci.

Cet entre-deux est une position pleinement assumée par Thibault Hazelzet. Car à quinconque tente de percer ces limbes photographiques, une nouvelle interrogation sourd alors, liée à l'indétermination du processus technique lui même. Oeuvre graphique? Photographie? Procédé argentique ou numérique? Disons d'emblée que ce processus créatif complexe qu'il ne nous appartient pas de révéler conjugue photographie argentique, travail graphique et démarche architecturale. Une fois achevée, chaque épreuve unique possédera, au dos, l'ektachrome coupé dont elle est tirée: ce qui pourrait apparaître de prime abord comme un geste un brin ostentatoire, s'incrit pourtant dans le droit fil d'une démarhe d'une grande cohérence. Car ce faisant, Thibault Hazelzet affirme l'aura de l'oeuvre unique, contre le caractère multiple de la photographie.

Cette affirmation nous conduit inévitablement à aborder le rapport évident de ces images à la peinture. Thibault Hazelzet, par le choix de titres de ses séries, nous y invite d'ailleurs. Par de là des références à une culture classique, c'est bien à une tradition de la peinture d'histoire et de religieuse que ces derniers renvoient. Mais la piste encore une fois tourne court. Car il serait vain de croire encore aujourd'hui en la possibilité de peindre et de représenter des grands récits fondateurs, si cen'est autrement que par des reliefs. D'où ces titres déceptifs qui pointent une absence et désignent un vide: des Danaé, et autres Dépositions, ne subsistent que des traces, des indices, des espaces d'où les figures se sont retirés, des architectures désormais désertées. En ce sens chacune de des images pourrait être qualifiée d'image mentale : comme autant de souvenirs lointains et confus de morceaux de peinture que Thibault Hazelzet, dans la solitude de son atelier réactiverait, par d'autres moyens."

 

Quentin Bajac, 2009 (publié dans le catalogue "Thibault Hazelzet - Photographies 2005 - 2009", galerie Christophe Gaillard)

Conservateur de la photographie au Musée d'Orsay de 1995 à 2003, puis du Centre Pompidou à partir de 2003. En 2013, il devient conservateur en chef de la photographie au MOMA à New-York, puis de retour à Paris en 2018 il prend la direction du Musée du Jeu de Paume.